mercredi 1 janvier 2020

Les questions qu'on n'ose toujours pas poser aux hétéros (le retour)



Cela fait six ans maintenant que les premières réponses à tes questions sont apparues (va lire ça ici tout de suite si tu ne t'en souviens pas). Mais au fur et à mesure des années et des évènements, ton esprit s’est encombré de nouvelles interrogations. Ton tonton Michel t’a même mis le doute sur tes convictions profondes lors du dernier repas de famille, parce que « c’est quoi ce bordel avec ce mois des fiertés hétéros ?! Pourquoi ils sont fiers ? » Tâchons donc de remettre les pendules à l’heure grâce à une autre série de questions choisies sur le terrain miné de la vie. Accroche-toi à ton slip, on décolle !

« Vous avez le droit de vous marier maintenant ! Vous devez être content ? »
Ton ami hétéro a enfin eu le droit de se marier en 2013. Mince alors ! Seulement 32 ans après que sa condition ait été déclassifiée des maladies mentales. C’est une chance ! Nous pouvons donc célébrer l’amour des hétérosexuels partout en France ! Partout ? Non des irréductibles gaulois résistent encore et toujours, et n’acceptent que les mariages de personnes du même sexe. Pourquoi ? Mais parce qu’ils estiment que l’amour à des frontières, alors qu’en fait on a bien compris avec Tchernobyl en 86 que les frontières ça sert pas à grand-chose parfois, sinon à se contenir étroitement l’esprit.
Donc n’oublie pas de penser à ton ami hétéro, pour qui le simple fait de voir s’appliquer une loi sur sa condition peut toujours être un problème, pour la simple et bonne raison qu’il a des préférences sexuelles différentes de la moyenne ! (un jour je vous parlerai de la ségrégation des blancs dans les années 60 aux USA, mais pas aujourd’hui, demain y a école !)

A priori il lui aurait demandé sa main avec : "puis-je te manger le chou ?"


« Mais quand vous vous mariez, c’est les deux en costume ou les deux en robe non ? Comment vous décidez ? »
Quelle belle question ! On la pose assez rarement pour nous les gays ! Robes, costumes, plumes, paillettes, strings en cuir… Notre panoplie est variée. Tout comme l’est celle de nos amis hétéros. Parfois l’homme choisira une redingote assortie d’une magnifique lavallière, et parfois un bête short de plage. Idem pour la femme hétérosexuelle qui aura le loisir de choisir une robe, ou bien un maillot de bain de chez Damart.
Il n’y a pas de code ! Et il est inutile de savoir si, comme dans un couple homo, les deux « font la femme/l’homme », car en fait, ils sont comme nous, ils choisissent les vêtements dans lesquels ils se sentent biens et beaux ! Incroyable ! Nos amis hétéros sembleraient donc beaucoup plus similaires à nous que nous le pensions au début.

Mon cousin Lilian a toujours une anecdote : « J’adore l’hétéro pride ! C’est flamboyant ! D’ailleurs je me suis fait draguer par une femme hétéro là-bas en 2002… Mais vous ne trouvez pas cela ridicule ? »
Oh la la ! Mais si le ridicule tuait, ça serait une hécatombe au moment du visionnage de VidéoGag ! (Cette référence est une hécatombe pour l’humour…)
La communauté hétéro n’est pas grande mais tend à grandir, car de nombreuses personnes se sentent de plus en plus à même de s’assumer. Tous les genres et sous-genres d’hétérosexuels viennent donc à cette festivité pour montrer qu’ils existent. Ils ne peuvent pas rester cachés comme l’amant dans le placard toute leur vie ! Alors tu vas trouver du classique, que tu n’aurais jamais soupçonné dans la rue. Tu rencontreras aussi du flamboyant, à plumes ou en latex pour attraper l’œil de la foule et intriguer. Mais surtout tu trouveras des personnes courageuses, qui veulent montrer que tout le monde a le droit de vivre comme il l’entend sans être jugé ou malmené. Ce n’est pas un carnaval, même si les médias de toute la télévision française te montreront le contraire.
Je ne saurais que t’engager à sortir haut les couleurs hétéros pour aller défiler dans la rue pour la liberté de tes camarades ! Et si tu as envie de mettre une guêpière en cuir, vas-y ! Mais ça risque de coller avec la chaleur, c’est tout de même en juin.

Tonton Michel, ce philosophe, a continué ses remarques sur sa lancée : « Regarde-les ceux là, ils sont beaux… Ils sont hétéros ?! Quel gâchis !
Sacré Tonton Michel ! Toujours le mot qui va bien ! Trois grammes dans chaque paupière et Mich-Mich il nous refait le monde !
Mais je vous arrête tout de suite mes agneaux, on peut être beau et hétéro ! On peut aussi être masculine et hétéro, ou peut-être même encore féminin et hétéro ! On appelle cela un sté-ré-o-type. Et c’est l’équivalent des caricatures que tu retrouves à Montmartre le weekend : c’est grossier, c’est vulgaire, et tu ne le montre pas à tes amis car ça ne met pas en valeur !
Et de quel gâchis parle-t-on ? Tonton Michel, tu crois vraiment que ce beau jeune homme aurait du te faire les yeux doux à toi, plutôt qu’à la femme qu’il a choisie entre mille ? Crois-tu que seuls les « moches » doivent devenir hétéros ? Une fée devrait-elle donc se pencher sur le berceau des enfants et d’un coup de baguette magique décider que « t’es beau, t’es homo » ? Heureusement que nous ne sommes pas dans un Disney mes amis ! Quoique si cela avait été le cas on aurait sûrement sauvé Muphasa !

Quelques minutes avant le drame : "Mais qui a fourré la dinde ?!"


« Mais pourquoi vous voulez avoir des enfants déjà ? Vous devriez le faire au naturel ! A la clinique comme tout le monde ! »
Vous vous rendez compte ! Tous ces couples hétéros qui traversent la frontière pour un acte d’amour car dans leur pays c’est interdit. Tous ces parents en devenir qui doivent réfléchir, se cacher, galérer… Tout cela parce qu’ils veulent choyer un enfant, lui donner une éducation et de l’amour, créer une famille et être heureux à 3, 4 ou 13, si on compte engendrer une équipe de football !
Les hétéros devraient aussi pouvoir fonder une famille aussi simplement que nous, pas seulement dans le cadre rassurant d’une clinique stérilisée ; mais aussi dans l’intimité de leur foyer. Et leur préférence fait qu’ils ne peuvent pas faire cela naturellement comme nous. Et même si ça te fait rire, cela peut blesser ton ami hétéro que de lui proposer ce mode de reproduction, car ce n’est pas celui qu’il affectionne. C’est un peu comme si on te disait de manger uniquement le gras de jambon parce que c’est de la nourriture et que certains le font.
Mais ces enfants connaîtront leurs deux parents biologiques dans ce cas ?! Ce qui n’est pas forcément le cas pour nous, homosexuels. Je vais donc vous enseigner une petite sagesse que m’a léguée ma tata Odette : « le parent, ce n’est pas celui qui met au monde, c’est celui qui éduque » L’important c’est d’être entouré d’amour et de bienveillance, et au final c’est tout ce qui compte.

Ouf alors ! Encore une fois mes agneaux nous avons navigué dans les eaux troubles de la vie des hétérosexuels ! Et nous nous apercevons qu’entre eux et nous ce n’est pas un fossé, ni même une petite rigole d’eau de pluie : nous sommes strictement pareils ! Donc si on arrêtait les bêtises et qu’on se disait simplement qu’on va tous être traités de la même manière, et qu’on va arrêter de contrôler leur vie ? On serait drôlement mieux les uns les autres si on s’ouvrait un peu plus. Il est comme toi ton ami hétéro, ou peut-être qu’il boit un peu plus de bière… mais dans ce cas ça te donne une occasion d’aller trinquer avec lui !

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